Un destin inattendu pour les deux frères comme pour la carrosserie Labonne dans le Puy-de-Dôme et dans l'Allier

Interface entre la petite industrie et l’artisanat, la Carrosserie Labonne grandit à vue d’œil dans le Puy-de-Dôme et l'Allier. Les deux fils du fondateur ayant à cœur de porter ses valeurs humaines comme son désir d’entrepreneuriat.

Le jaune pétard qui habille la devanture de la carrosserie Labonne est toujours là. C'était l'idée, il y a 50 ans, de Gérard Labonne, décrocheur scolaire, mais apprenti carrossier de talent. À 23 ans, il décide qu’il est bien capable d’avoir sa propre carrosserie. Lui et un peintre. Nous sommes en 1973. L'atelier est toujours au même endroit, rue des Varennes. Mais il s’est agrandi. Et a désormais des petits frères à Clermont-Ferrand (2013), à Vichy-Abrest (2020), à Pont-du-Château (2022) et Cusset (2023).

Des valeurs

Gérard Labonne, lui, n’est plus là. Mais ses valeurs, si. Respect du travail bien fait, du conseil client dans un monde où les assureurs sont rois, et du bien-être au travail, avant que cela ne s’appelle QVT.

Une vraie culture d’entreprise familiale portée haut par ses deux fils, dorénavant cogérants : Benjamin depuis 2011 et Valentin depuis 2020.

Tous les deux ont trois points communs : surdiplômés, ils n’étaient pas destinés à reprendre l’entreprise, mais s’épanouissent aujourd'hui en portant un réel projet de compétences et de performance économique. Et, tous les deux, ils ont dû faire leurs preuves à la carrosserie, chacun à leur tour, en partant tout en bas de l’échelle.

Doctorant en physique théorique et mathématique

En 2007, Benjamin, le doctorant en physique théorique et mathématique, repart même à l’école. En apprentissage pour un CAP carrosserie mention peinture puis un CAP mécanique puis en systèmes électroniques embarqués.

Les enseignants pensaient qu’avec mes études, j’allais tout savoir avant les autres. Mais c’est tout un monde que je découvrais. Moi, je me destinais à la science dure, à la recherche.

Sauf que la concurrence est rude et qu’il n’y avait pas de réelle opportunité d'emploi. À cette époque, « mon père commençait à penser à la transmission de la carrosserie. Il a cru tomber de sa chaise quand je lui ai proposé de le rejoindre. Intellectuellement, j’étais allé au bout de mon projet et j’étais fier de ce qu’il avait construit de son côté ».

Pour contourner les difficultés de recrutement, Benjamin et Valentin (à gauche) investissent dans l’apprentissage, six apprentis à Aubière (dont une fille, Chloé !) en plus des dix salariés. 

Les circonstances et la maladie de son père l’obligent à reprendre seul les rênes beaucoup plus vite que prévu. Il a 31 ans. « C’était compliqué. Mais les salariés sont là depuis longtemps », Benjamin Labonne les côtoie à l’atelier. Assez pour lui donner confiance et, même, saisir l’opportunité de la reprise d’une carrosserie à Clermont-Ferrand en 2013. Qui devient vite aussi importante que celle d’Aubière.

Mais, « seul, à me dédoubler… ». C’est là que Valentin, son petit frère, entre en scène. Ils ont 17 ans d’écart. Il vient de réussir son master en gestion des organisations. Son truc à lui, c’est le sport. Il a postulé au Clermont Foot, « 200 candidatures pour le poste de stadium manager, j’ai terminé deuxième ! ». Sans plan B.

Benjamin Labonne lui propose alors de le rejoindre et lui présente un projet : faire grandir la carrosserie Labonne. Avant, comme son père avant lui, il challenge son frère : « Pendant un an, j’ai fait les allers-retours à Vichy pour reprendre un atelier ». Ça marche. Les deux frères poussent alors les portes de leur zone de confort et reprennent un atelier à Pont-du-Château orienté vers le camping-car.

« Il a fallu apprendre de nouveaux métiers, la menuiserie comme déposer des toilettes ». Ils ont l’habitude. La carrosserie, à 90 % des réparations après des collisions, « c’est de la tôle, mais aussi démonter un moteur, un radiateur, de l’électronique… et le remonter ».

Autour de Pédro, Ryan en apprentissage et Quentin, en 3e, venu découvrir le métier pour décider de son orientation.

Chaque atelier est conçu comme autonome, « un chef et une assistante », et les fonctions de back-office sont désormais mutualisées. Le chiffre d’affaires progresse, 3,5 millions d’euros en 2023. Pour contourner les difficultés de recrutement, les deux frères investissent dans l’apprentissage, six apprentis à Aubière en plus des dix salariés. « Avec nos différentes carrosseries, nous avons des opportunités à leur offrir ». Et ils ne prévoient pas de s’arrêter là. À la soirée des 50 ans de la Carrosserie Labonne, l’an dernier, ils étaient 120… en famille. 

Cécile BergougnouxPhotos Franck Boileau