Des vermifuges plus efficaces sur les bousiers que les vers ? Une étude cantalienne pour remédier à ce problème

Parmi les études menées au sein de la clinique de la haute Auvergne, à Saint-Flour, une concerne l’efficacité des vermifuges et porte sur les bêtes passant l'été dans les estives de la Coptasa. Pour mieux les soigner.

« ECette étude a commencé en 2021, retrace le docteur Laurent Dravigney. Nous l’avons mené avec l’INRA et trois étudiants en thèse de l’école de Nantes. On a étudié 17 élevages bovins laitiers et allaitants. On a pratiqué des coproscopies (l’étude des bouses, NDLR) avant le traitement des bovins et après. Et on a pu constater la présence d’œufs de strongles (des vers parasitaires, NDLR) dans la majorité des troupeaux après traitement. » Une deuxième étude, l’an passé, pour la Coptasa « a montré une perte d’efficacité totale du traitement sur les cas étudiés ».

Impact environnemental

Or, si ce traitement, le même depuis quatre décennies, ne s’avère plus efficace face à des vers qui ont muté, ils ont un impact sur l’environnement.

 Ils sont insecticides. Or, la bouse est un biotope en soi qui accueille plusieurs insectes, des bousiers, des mouches… qui eux-mêmes sont la base d’une chaîne alimentaire. Moins d’insectes, c’est moins d’oiseaux, moins de chauves-souris… On constate une baisse de ces populations. Et le traitement médicamenteux des animaux est une des pistes pour l’expliquer

Autre désagrément, économique cette fois, « le vermifuge a un coût pour l’éleveur de 5 à 10 € par bovin. Si ça ne sert à rien, pourquoi payer ? D’autant que les vers agissent sur le poids des bovins, ce qui entraîne une autre perte économique pour l’éleveur. »

Le parasite en question 

Protocole

Le vétérinaire travaille donc à un nouveau protocole à mettre en place pour les agriculteurs « qui soit le plus réaliste possible. On peut en imaginer des très efficaces, mais s’ils sont trop compliqués, les éleveurs ne les appliqueront pas. Il faut donc trouver la bonne molécule mais aussi le bon dosage, le bon mode d’administration. » 

Préoccupation

Et le directeur de l’estive collective, Laurent Bouscarat,  est très satisfait de cette démarche. « Quand il m’a contacté, j’ai tout de suite accepté. Parce que la résistance aux antibiotiques, aux antiparasitaires, c’est un sujet qui nous préoccupe. Et l’environnement qu’on crée, avec un brassage des bêtes venant de très nombreux troupeaux, est idéal pour ce genre d’étude. »Jusqu’ici, en matière de vermifuge, 

 on sortait le parapluie, en traitant toutes les bêtes à leur arrivée. On était un peu obligé : on a une obligation de résultat, on ne peut pas rendre en septembre des bêtes plus maigres qu’elles ne l’étaient à l’arrivée. Mais on avait bien le sentiment que ce n’était pas forcément la meilleure façon d’agir, et cette étude est venue confirmer notre sentiment

Moyens

Même si, en matière environnementale, « je suis incapable de dire l’influence des médicaments. Mais ce que je constate, c’est une perte fourragère de 15 % en moyenne ces dernières années. On a tendance à l’imputer au réchauffement climatique, aux campagnols, mais des études étrangères disent que la sur-médicamentation a aussi un impact. Alors pourquoi ne pas essayer ? »

Les estives collectives, bon lieu d'étudeD’autant « qu’on a les moyens de tenter des choses, avec nos bergers qui s’occupent des bêtes quotidiennement. Et que c’est aussi notre travail d’apporter des éléments nouveaux aux éleveurs et en l’occurrence, ce type d’étude répond à une demande de leur part. On est dans notre rôle, et on travaille aussi avec le GDS ou le parc des Volcans pour imaginer des évolutions en matière d’élevage. »

Yann Bayssat