Dans le bassin de Vichy, bientôt un centre de santé...pour soigner les soignants
Un projet pour les soignants, et par les soignants. Son nom ? Les Bazars de la santé. Un acronyme propre à interpeller, derrière lequel se cache surtout une ambitieuse volonté. Celle, portée par un véritable docteur courage, Candice Delbet-Dupas, d’ouvrir aux portes de Vichy un établissement de santé d’un nouveau genre. Détails.
Elle ne veut pas attendre qu’il soit trop tard. Que les soignants soient définitivement las et que les vocations, elles, ne soient plus là. Elle veut, encore et toujours, en 2024 comme pour l’avenir, que le métier de soignant relève encore d’une vocation. Et que cette profession garde tout son sens. Car elle en est persuadée : « Si on ne croit pas en un métier, alors on ne le fait pas, ou plus ».
Nom de code : Bazars.Alors, pour qu’il y ait encore des soignants, et des soignants en bonne santé, le docteur Candice Delbet-Dupas, chirurgienne à l’hôpital de Vichy, a décidé d’agir, soutenue par son compagnon Benjamin, kinésithérapeute. Et ce, en portant un projet qui a « donné un sens à sa vie », rien de moins. Nom de code : Bazars. Pour Boîte à zen et à ressources de la santé.
C'est là, dans cet ancien restaurant fermé depuis quatre ans, que le centre doit voir le jour. Un « bazar » bien ordonné en l’espèce, tant l’ambition portée est grande. Mieux : « Elle n’a pas d’équivalent en France, peut-être même pas en Europe », assure Candice, guère effrayée par les défis. Ça tombe bien : ils seront nombreux pour elle et son équipe des Bazars, ces prochains mois.
Du yoga, de l'ostéopathie, de la pair-aidance, de l'écoute...C’est que Candice a déjà fixé un cap clair : le mois de décembre 2024. Là, en lieu et place de l’ancien restaurant La Colombière, à Abrest, la professionnelle de santé et tous les acteurs de son association espèrent pouvoir ouvrir un centre de santé d’un genre inédit. Car il s’agira d’y accueillir… des soignants. Lesquels, aujourd’hui, face à la fatigue et à l’impression de ne plus pouvoir bien faire leur travail, « ne se sentent plus connectés, ressourcés, ou en accord avec leurs valeurs. Or il faut leur donner les moyens de retrouver tout cela », pose Candice, elle-même victime de la souffrance au travail et même d'un burn-out, il y a deux ans.
D'importants travaux devront être menés pour remettre en l'état le restaurant (ici côté cuisine).Et l’un de ces moyens pour aider les soignants sera donc un site unique en son genre. Un centre spécifique et même un vrai cocon où des soignants de tous profils pourront trouver tout un panel d’outils pour penser un peu à eux, et même beaucoup. Le centre, de dimension holistique, proposera à la carte des prestations d’ostéopathie, de méditation, de yoga, voire de psychomotricité.
Également sous réserve du paiement d’une petite cotisation, des ateliers de santé intégrative (prise en charge personnalisée du sujet) ou de soft kills (travail sur les compétences en communication, sur l’intelligence émotionnelle) sont aussi prévus. Autre pilier du projet : la pratique de la pair aidance, soit « un partage d’expériences entre soignants afin de s’encourager et de se remotiver ».
"Il y a aujourd’hui urgence absolue de prendre soin de ceux qui soignent, sans quoi plus personne ne pourra l’être dignement…C'est un défi, mais je ne suis plus à un challenge près. "Candice Delbet-Dupas (empty)
Une ruche de bienveillance et d’écoute animée par et pour les soignants, donc, qui n’aura pas vocation à faire du curatif, mais bien de permettre aux soignants de renouer avec le bien-être dans leur travail. Et, par ricochet, dans leur vie personnelle. « Beaucoup d’acteurs de santé négligent les soins pour eux, alors qu’ils les encouragent pour les patients. Cette situation doit évoluer, il y a aujourd’hui urgence absolue de prendre soin de ceux qui soignent, sans quoi plus personne ne pourra l’être dignement… », appuie encore Candice.
Et la Vichyssoise est déjà suivie dans son projet par de multiples professionnels de santé, hospitaliers ou libéraux, sachant que ce sont eux, précisément, qui animeront les ateliers et feront vivre le centre. Des volontaires qui viendraient en fonction de leurs possibilités, de leurs envies, de leurs besoins aussi, eux qui trouveraient là l’occasion de diversifier leurs activités, « ce qui est fondamental dans la prévention de l’épuisement professionnel ».
Le futur centre voudra aussi garder l'âme et le charme d'un lieu connu de beaucoup d'habitants du bassin vichyssois.
Remettre le lien au coeur de la vie des acteurs de santéSurtout, une telle émulation entre soignants permettra aussi, d’après la fondatrice du centre, de « remettre le lien » au cœur de la vie des acteurs de santé, alors qu’aujourd’hui, nos métiers ont tendance à se déshumaniser et qu’on a même plus le temps de se parler. Or si le soignant est déshumanisé, le patient l’est aussi ».L’humain. Une notion fondamentale en somme pour un projet qui vise à poser les bases « de la santé de demain ». Une santé dont les soignants ne soient plus de simples maillons voués à souffrir en silence, mais des acteurs pleinement épanouis dans leur métier. « C’est un défi, sourit Candice. Mais je n’en suis plus à un challenge près ».
Une longue réhabilitation en vue.Candice Delbet-Dupas et son compagnon Benjamin Dupas ont définitivement acquis l’ancien restaurant de La Colombière, à Abrest, fin décembre 2023. L'établissement, qui a longtemps appartenu à la famille Sabot, est fermé depuis début 2020.L’association des Boîtes à zen et à ressources de la santé (Bazars) a de son côté été fondée en octobre dernier. Elle est locataire depuis le 1er janvier de cet ancien restaurant d’une surface de 620 m2, qui devra être totalement réhabilité au prix d’un chantier estimé à 1,5 million d’euros.Ici l'accès à l'ancienne salle de restaurant, restée dans son jus...Une somme qui pourrait être financée via une campagne de crowfunding, un appel à fondations, ou une demande de subventions publiques.La transformation du restaurant, dont beaucoup de pièces sont totalement à refaire, relève d’une mission au long cours. Le centre de santé accueillera des salles de soins, de détente, de travail, mais aussi des espaces de relaxation et de convivialité, voire un hammam et un escape game. Le tout avec vue plongeante sur l’Allier.=> Renseignements sur le site lesbazarsdelasante.fr, et sur le site kisskissbankbank.
Texte Pierre Geraudie
Photos François-Xavier Gutton