Qui sont les jeunes délinquants accueillis au Centre éducatif fermé de Lusigny (Allier) ?

Le Centre éducatif du Bourbonnais (CEF), à Lusigny, accueille des mineurs délinquants âgés de 15 à 18 ans. Qui sont-ils ? Comment la structure contribue-t-elle à les réinsérer ? Réponses de Rachid Soulam, son directeur.

Rachid Soulam, qui sont les mineurs placés au Centre éducatif fermé du Bourbonnais ? 

Ce sont des garçons âgés de 15 à 18 ans qui ont commis des infractions, bien souvent des trafics de stupéfiants ou des cambriolages. Leur placement est imposé pour une période de six mois, renouvelable une fois, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, d'un sursis avec mise à l'épreuve ou encore d'une libération conditionnelle. Les mineurs que nous accueillons à Lusigny peuvent être originaires de toute la France mais nous essayons de privilégier des jeunes de la région centre-est pour une meilleure efficience avec leur famille et les éducateurs de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). 

Le CEF du Bourbonnais à Lusigny Le mineur délinquant placé en Centre éducatif fermé originaire des cités, c'est un cliché ? 

Oui, tout à fait. Il n'y a pas de profil type chez nos résidents. Nous avons des jeunes issus de tous les milieux sociaux, y compris de familles aisées. 

Que font-ils pendant les six mois à un an passés au CEF ?  

Durant cette période, le projet, c’est de les aider à grandir et à s’insérer dans la société. Les deux premiers mois sont consacrés à les accueillir, à mieux les connaître, à leur fixer des objectifs. C’est à partir de ce bilan que l’équipe construit un projet éducatif individualisé. Pendant les deux mois suivant, ils accomplissent un stage d’insertion professionnelle - métiers manuels ou de bouche généralement - ou, pour ceux qui en expriment le souhait, ils retrouvent le chemin de la scolarisation. Quant aux deux derniers mois, nous les mettons à profit pour consolider leur projet de vie avec les solutions les plus appropriées et pour les préparer à la sortie du CEF. 

Rachid Soulam, le directeur du CEF du Bourbonnais Sur quoi insistez-vous quand un jeune arrive pour la première fois au CEF ? 

Sur l'accueil, tout simplement. C'est très important. Quand ils arrivent, ils peuvent être très tendus, évidemment... Certains sortent d'une garde à vue de 48 heures et d'une comparution immédiate au tribunal. Ils peuvent arriver à n'importe quelle heure du jour et de la nuit... Donc oui, les premiers contacts avec eux sont très importants. 

Des jeunes du centre éducatif fermé de Lusigny aident des seniors à naviguer sur internet

Vous arrivez à savoir ce que deviennent ces jeunes après leur passage au CEF? Combien d'entre-eux arrivent-ils à se réinsérer dans la société ? 

Nous savons ce qu'ils deviennent quand ils nous appellent pour nous donner de leurs nouvelles, mais nous n'avons pas de chiffres officiels sur les taux de réinsertion.  Généralement, ceux qui téléphonent, c'est pour nous dire que tout va bien pour eux et qu'ils ont réussi à éviter de retourner en prison.

Quel est le message principal que vous tentez de leur faire passer pendant la durée de leur passage au CEF ? 

Qu'il est très facile de faire des conneries, que c'est à la portée de n'importe qui. Mais, qu'ensuite, il est très difficile de s'en sortir. 

Le CEF de Lusigny. Géré par l'association Le Prado, le centre éducatif fermé du Bourbonnais, à Lusigny, accueille onze à douze mineurs de 15 à 18 ans multirécidivistes (commettant toujours le même délit) ou multi-réitérants (commettant des délits différents).  Habilité par la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ), il constitue une alternative à l’incarcération pour des mineurs sous contrôle judiciaire, en sursis avec mise à l’épreuve, liberté conditionnelle ou en placement extérieur, après l’échec de mesures éducatives. Sa mission consiste à assurer les fonctions d’accueil, d’hébergement, de protection et d’accompagnement éducatif de ces jeunes, dans le but de favoriser leur insertion sociale et professionnelle. Le terme « fermé » renvoie à la fermeture juridique définissant le placement, c’est-à-dire que tout manquement grave au règlement du centre est susceptible d’entraîner une détention. Le CEF fonctionne avec vingt-sept personnes : directeur, chefs de service, secrétaire, éducateurs, psychologue, veilleurs de nuit, maîtresses de maison, instituteur détaché de l'Education nationale 

Interview Antoine Delacou