Produire du porc pour mieux vendre leur boeuf, le pari réussi de deux éleveurs bio d'Auvergne
Se lancer dans la production de porcs pour mieux vendre en direct leur bœuf charolais bio, c’est le pari réussi des deux associés du Gaec Courteix à Saint-Georges-de-Mons (Puy-de-Dôme). Une diversification créatrice d’emplois et porteuse d’avenir.
En trois coups de pelle, le bulldozer a eu tôt fait d’aplanir tout imprévu futur. Au mois de mars, la terre dénudée sera recouverte d’un bâtiment de 400 m² qui abritera un laboratoire de découpe, une salaison, une cuisine ainsi qu’un magasin, en forme d’écrin pour les producteurs fermiers locaux. La dernière pierre d’un projet de diversification aussi atypique qu’exemplaire.
Au lieu-dit Courteix, sur la commune de Saint-Georges-de-Mons (Puy-de-Dôme), les vaches laitières ont longtemps régné. Comme un peu partout dans cette partie des Combrailles qui vit à l’ombre de la chaîne des Puys.
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Les charolaises ont remplacé les vaches laitières lors de l'installation de Damien Raynaud en 2010.
Carte d'identité de l'exploitation. Le Gaec Courteix, résultat de la fusion de trois exploitations différentes, s’étend sur 190 hectares et compte 150 mères charolaises. En plus de la production de viande, les associés cultivent 40 hectares de blé transformés en farine. Le reste des cultures (méteil, pois, vesce, tritical, etc) est destiné à l’alimentation des animaux. « Nous sommes à 100 % autonomes », souligne Damien Raynaud.
Mais quand en 2010, après cinq ans chez John Deere, Damien Raynaud reprend la ferme de ses beaux-parents d’alors, l’ex commercial décide de basculer vers la production de viande bovine. Un choix logique puisqu’il vient également de prendre le relais du paternel, « qui en avait plein les bottes », à la tête de la petite exploitation familiale, 30 charolaises et 50 hectares.
"Une association fictive au départ"« Mais comme mon père était pluri-actif, je me suis retrouvé avec des droits à produire très limités et l’impossibilité de bénéficier du dispositif d’aides à l’installation. Du coup, j’ai été obligé de m’associer avec mon beau-frère, Laurent Barlot, pour que cela soit viable », raconte-t-il.
La relève se prépare déjà au Gaec Courteix où l'élevage est une passion familiale.
Une association « fictive » au départ qui a, au final, débouché sur un mariage en bonne et due forme, accouchant d’un projet visionnaire autour d’une commercialisation en circuits courts.
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« Depuis, nous n’avons cessé de nous développer. En 2011, nous avons commencé à penser à la vente directe en nous rapprochant d’un agriculteur disposant d’un atelier de découpe à Davayat. En 2012, nous avons construit des bâtiments plus adaptés pour les animaux, qui ont aussi permis d’éliminer le gaspillage alimentaire. En 2016, nous avons entamé notre conversion en bio car, quand on a regardé le cahier des charges, cela collait avec ce que l’on faisait déjà. Parallèlement, nous nous sommes lancés dans un projet de création d’un lieu mêlant atelier de découpe, salaison, magasin et partie restauration regroupant cinq agriculteurs. L’étude, financée par la communauté de communes, avait presque abouti. Nous avions même trouvé un emplacement près de Vulcania, quand deux collègues ont jeté l’éponge », rembobine Damien.
"La demande, le potentiel étaient là"L’affaire aurait pu en rester là. C’était sans compter avec la pugnacité des deux compères du Gaec Courteix. « Nous avons mis quatre mois à nous en relever. Puis, on s’est dit qu’on ne pouvait pas renoncer, que la demande, le potentiel étaient là. On a donc repris le projet à l’échelle de l’exploitation. »
Objectif transformation. En 2019, la ferme des Lozamies transformera 25 vaches et 90 cochons. « L’objectif est de passer à 35 vaches et 250 cochons. Nous voulons descendre progressivement le nombre de mères et stopper les broutards afin de produire des bœufs castrés. Histoire de tout transformer », avancent les deux associés.
C’est à ce moment précis qu’entre en scène le porc. « Toutes les études montrent qu’une boucherie, c’est deux tiers de porc, un tiers de bœuf. Le ratio est intangible. Nous avons donc commencé à faire du porc pour doper les ventes de notre bœuf. Avec succès. »
Dans le magasin attenant à la ferme, le consommateur peut à la fois acheter des produits de l'exploitation mais aussi ceux d'autres producteurs fermiers des environs comme du fromage.
Grâce au futur atelier-magasin, les deux associés vont changer de dimension. « En plus de la vente directe au niveau local, nous allons développer la commercialisation sur les grandes villes : Paris, Lyon et le Sud. C’est essentiel en termes de valorisation car c’est là que se concentre le pouvoir d’achat. »
"Une dynamique de création d'emplois"Une dynamique économique qui se traduit par des créations d’emplois. « Nous avons débuté à deux. Nous sommes aujourd’hui six. Et nous devrions être dix d’ici deux à trois ans », conclut Damien.
Contact. La Ferme des Lozamies (Gaec Courteiux) 63870 Saint-Georges-de-Mons. Web : lafermedeslozamies.com. Tel : 06.45.80.89.07
Textes : Dominique Diogon
Photos : Jean-Louis Gorce