Le dalaï lama plaide pour le dialogue interreligieux face à la "peur"
Le cardinal, le pasteur, le métropolite orthodoxe, le grand rabbin, le responsable musulman... et le moine bouddhiste tibétain: le dalaï lama a dialogué mercredi avec les représentants des cultes à Paris, plaidant pour une meilleure connaissance entre croyants face à la "peur" et au terrorisme.
"Nous, êtres humains, avons tous en nous l'essence de la compassion (...) mais nous créons des problèmes à cause de la peur, de la colère et de la frustration", a estimé le chef spirituel tibétain lors d'une rencontre à son initiative au collège des Bernardins, centre d'enseignements et de débats du diocèse de Paris.
Le dalaï lama a rappelé son souhait de promouvoir "l'harmonie si indispensable des religions", soulignant qu'elles étaient parfois "ferments de division", contraires à leur "message d'amour" et qu'il était "essentiel de mieux se connaître les uns les autres". Et de détailler trois méthodes : des rencontres avec des spécialistes pour une "compréhension correcte" des autres cultes, des contacts avec des pratiquants "pour aller au coeur même de nos traditions", mais aussi des pèlerinages dans des hauts lieux sacrés "pour tisser des liens d'amitié".
Le dignitaire tibétain a redit que parler de "terrorisme musulman ou de terrorisme bouddhiste n'a pas de sens", et souligné les vertus du "jihad intérieur", qu'il a comparé à la méditation bouddhiste quand il s'agit d'"éliminer les émotions destructrices".
"Je partage totalement cette définition du jihad", s'est réjoui le président du Conseil frabçais du culte musulman (CFCM), Anouar Kbibech. Lui aussi a plaidé pour la "fraternité, mot magique car ayant à la fois une valeur religieuse et laïque". "Malheureusement certains musulmans s'arrêtent au premier cercle, qui est la fraternité entre musulmans", a-t-il relevé, soulignant la nécessité d'une "fraternité entre croyants et dans l'humanité".
"Il ne s'agit pas de faire du syncrétisme, mais c'est parce que nous sommes différents que nous pouvons faire de l'unité, qui est l'inverse de l'uniformité. On le doit à la laïcité qui nous permet d'être dans l'équité et non pas en compétition", a fait valoir pour sa part le grand rabbin de France, Haïm Korsia.
Le cardinal André Vingt-Trois, archevêque catholique de Paris, s'est réjoui de cette rencontre qui "aurait été inimaginable" il y a cinquante ans, alors que "la connaissance mutuelle que nous avions étaient infiniment moins riche qu'aujourd'hui".
Président de l'Union bouddhiste de France (UBF), le moine zen Olivier Wang-Genh a lui mis en exergue, au-delà des différences, "la source" de toutes les religions: "le silence". Et invité la salle à observer non pas une minute de silence, comme après chaque attentat en France, mais "60 secondes" d'un silence partagé dans la "joie".