Avec la pluie et le manque d'insectes, les hirondelles sont-elles menacées en Creuse ?
La météo pluvieuse de ces derniers mois a-t-elle eu un impact sur l’arrivée des hirondelles en Creuse ? Éléments de réponse avec un expert de la Ligue de protection des oiseaux.
Elles sont le symbole du printemps et de l’arrivée des beaux jours. Les hirondelles reviennent chaque année, après avoir passé l’hiver dans les grandes zones humides d’Afrique centrale. Mais elles se font malheureusement de plus en plus rares en Limousin.
1. Quelles sont les espèces présentes en Creuse ?Les deux espèces les plus présentes en Limousin sont l’hirondelle rustique et l’hirondelle de fenêtre. « L’hirondelle rustique niche à l’intérieur des bâtiments, dans des étables, des granges, des caves, des garages », explique Franck Taboury, chargé de mission d’éducation à l’environnement et d’étude ornithologique à la LPO du Limousin. L’hirondelle de fenêtre niche, elle, dans des angles de fenêtres. « C’est quelque chose qu’on voit très peu aujourd’hui. Tout le monde a changé ses fenêtres depuis 50 ans, poursuit l’expert. Il reste quelques communes où il y a encore des hirondelles dans les angles des fenêtres. Sinon, elles sont sous les avant-toits des maisons. »
2. Les hirondelles ont-elles du retard cette année ?Elles sont arrivées « dans les temps » selon Franck Taboury. Les hirondelles rustiques sont présentes en ce moment en Creuse. Elles ont commencé la nidification mais certaines ont vite renoncé. « Les conditions météo ont fait qu’elles ne trouvaient pas assez à manger. Elles ont quitté le nid. Elles se rassemblent autour des points d’eau, des étangs, des grandes zones humides, là où il y a le plus de nourriture, là où il y a le plus d’insectes, détaille le chargé de mission. Elles se concentrent en ce moment dans ces endroits et leur problème, c’est de trouver à manger. Il y en a qui n’ont même pas commencé la nidification. Elles sont sur des zones humides et elles chassent la journée. Elles passent leur temps à trouver à manger. Il y en a beaucoup qui ont abandonné la nidification. C’est lié aux températures et à la présence d’insectes. En dessous de 10°, il n’y a plus trop d’insectes, surtout avec la pluie et le vent. Quand il va y avoir suffisamment d’abondance de nourriture, ça va déclencher la ponte et la reproduction. » L’hirondelle de fenêtre arrive traditionnellement un peu plus tard, entre la mi-avril et la fin avril. « Pour le moment, on n’en a pas vu beaucoup », estime l’expert de la LPO.
3. Quelles sont les conséquences de ces mauvaises conditions météo ?Il y aura moins de naissances cette année, c’est une certitude. « La première vague de naissances n’aura pas lieu. S’il se met à faire beau, elles vont se remettre sur les nids et vont démarrer une couvaison. Pour les hirondelles de fenêtre, les derniers jeunes s’envolent au 15 septembre. Ça leur laisse une marge pour faire une nichée, voire deux, mais pas plus. »Recensement et comptage des hirondelles à GuéretLes hirondelles sont moins nombreuses chaque année. « Il y a une forte mortalité pendant la migration, à l’aller et au retour, indique Franck Taboury. Moins il y a de jeunes à l’envol, moins il y a d’individus qui reviennent au printemps suivant. »
4. Quelle est la tendance globale ? C’est l’hécatombe ?Les populations ont chuté. « Tous les insectivores stricts ont tendance à diminuer », note l’expert. Au niveau national, pour les deux espèces d’hirondelles (rustique et de fenêtre), il y a -40 % d’oiseaux en 20 ans. En Limousin, c’est -40 % pour l’hirondelle rustique et -70 % pour l’hirondelle de fenêtre.
5. Que peuvent faire les particuliers pour aider les hirondelles ?On peut favoriser la présence d’insectes : « Ne pas passer la tondeuse toutes les semaines, laisser des îlots où poussent des fleurs pour favoriser les insectes. Plus on aura d’espaces fleuris, plus on aura d’insectes, plus les hirondelles trouveront de la nourriture, résume Franck Taboury. Il faut qu’il y ait des ressources en nourriture proches des nids. Les hirondelles font 150 allers-retours par jour pour nourrir leurs petits ». La présence de boue est aussi essentielle. « Parfois des colonies disparaissent car elles ne trouvent pas de boue pour construire des nids ou les réparer. Il faut préserver des zones de boue, des ornières. À certains endroits, on peut installer des bacs à boue. Dans les espaces verts, au lieu de faire des choses très entretenues, il faut essayer de laisser une zone de boue à un endroit. » Il existe aussi des nichoirs artificiels.
6. Pourquoi faut-il préserver les hirondelles ?L’hirondelle est une espèce protégée. Comme tous les oiseaux insectivores, c’est un formidable allié pour éviter la pullulation d’insectes, notamment les moustiques. « Aujourd’hui, avec l’arrivée du moustique tigre, plus on aura d’oiseaux insectivores autour de sa maison, plus il y aura une prédation sur l’insecte et moins ils seront nombreux. » L’hirondelle consomme énormément d‘insectes (150 béquées par jour pour nourrir ses petits). Pour Franck Taboury, les hirondelles font aussi partie de notre patrimoine naturel : « Un village sans hirondelle, c’est triste. C’est comme les martinets avec leur cri très aigu qu’on entend tout l’été. Ça serait dommage de perdre ces populations d’oiseaux qui se sont adaptées à notre bâti, à nos maisons. »
Comptage des hirondellesIl fallait s’inscrire avant le 30 avril pour participer à l’enquête de la Ligue de protection des oiseaux, qui aura lieu cette année du 10 juin au 10 juillet. Mais grâce aux outils de science participative (site faune-limousin ou appli NaturaList), il est encore possible d’apporter sa contribution. Il s’agit de compter les nids d’hirondelles autour de chez soi et le nombre de nids occupés.
Catherine Perrot
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