Accusé d'avoir tué son épouse à Aurillac en 2016 : l'avocat général requiert la réclusion criminelle à perpétuité
Ce mardi 25 juin, l'avocat général Slovia Stelzig a requis la réclusion criminelle à perpétuité contre Jean-Jacques L., accusé d'avoir sauvagement assassiné son épouse, à Aurillac, en août 2016.
C'est la plus haute peine prévue par le code pénal. Réclusion criminelle à perpétuité, ici assortie d'une période de sûreté de 18 ans : c'est ce que l'avocat général Slovia Stelzig a requis contre Jean-Jacques L., à l'issue de deux jours de débats.
L'homme, 55 ans, est poursuivi pour avoir tué sa femme, le 11 août 2016, dans l'appartement de la cité Limagne qu'elle avait pris pour refaire sa vie. Férolle, 26 ans, n'avait aucune chance de survivre : la gorge, notamment, avait été tranchée, très profondément.
« Il la regarde dans les yeux et il l'égorge comme un animal »
L'enfant du couple, 3 ans, est dans l'appartement, il a ou aurait pu voir le corps de sa mère – ce n'est pas clair. Alors la déchéance de la parentalité, si elle n'est pas requise formellement, « cela ne me choquerait pas », estime l'avocate générale.
Parties civiles. Représentant l'enfant, Me Patricia Papy a dénoncé la « froideur » de son père, « soulignée dans tous le dossier. L'enfant, aujourd'hui âgé de 5 ans, n'est pas une victime indirecte. Selon l'avocate, « il a régressé, il a des réveils nocturnes. » « Il a une phrase récurrente quand il n'obtient pas ce qu'il veut dans la cour de récréation : "Je vais te tuer" » Représentant la famille de Férolle, Me François-Xavier Matsounga a nuancé les aspects culturel de cette affaire : l'accusé est arrivé en France depuis 30 ans, en provenance du Congo, et la victime l'avait rejoint il y a trois ans. Coureur de jupon, Jean-Jacques L. tente de justifier son attitude par la polygamie ? L'avocat s'agace, cite le code Congolais de la famille, art. 121 : si la polygamie existe, « la monogamie est de droit commun. » « L'accusé est intelligent, mais il met son intelligence au service de son narcissisme... », estime la partie civile.
Slovia Stelzig a invité la cour à se concentrer sur la première version donnée, quelques heures après qu'il ait été interpellé, dans le calme, par la police. Le quinquagénaire n'avait rien fait pour fuir ses responsabilités, après les faits. C'est lui qui avait mené la police au corps, lui qui avait expliqué, par le menu, sa version des faits.
À l'enquêtrice sociale, il avait expliqué :
Je lui avais dit que cela terminerait comme cela. Elle ne m'avait pas cru.
Alors pour l'avocate générale, les poursuites pour meurtre avec préméditation sont justifiées. La soirée commence par une visite chez un homme que l'accusé soupçonne de tourner autour de Férolle. Il sonne, mais ce dernier préfère descendre, « il est inquiet de la tournure que cela peut prendre, analyse l'avocate générale. Il a eu un instinct de survie. »
Elle est prévenue de son arrivéeDe fait, Jean-Jacques L. ne sort pas le couteau, qu'il dit avoir dans son pantalon de sport, sur lui. Mais il traverse la ville, pour rejoindre le domicile de Férolle. Celle-ci est prévenue par l'homme qu'il vient de visiter, mais elle le prend pas au sérieux. De la « naïveté », estime-t-elle.
Il faut une dizaine de minutes pour rallier la cité Limagne. C'est là que les faits se déroulent.
« Il a eu tout le temps qu'il fallait pour réfléchir et renoncer à son projet pendant le trajet », pour le ministère public.
Crime passionnel pour la défenseEn face, Me Peggy-Anne Julien écoute. « Un jour et demi de débat, c'est court pour des réquisitions de réclusion criminelle a perpétuité », peste-t-elle. Comme son client l'a maladroitement fait au court de débats où il a semblé manquer d'empathie, elle revient sur la préméditation.
Pour elle, c'est un crime passionnel, au sens premier du terme. Une pulsion. Elle lit La barbarie des hommes ordinaires, du psychiatre Daniel Zagury. « Il a basculé devant une situation qu'il ne pouvait pas assimiler », estime l'avocate. Il se souvient de 4 coups de couteau ? Il y en a eu treize, au moins : « Il voulait que cela s'arrête. Il se disait : "Je vais multiplier les coups, et tu ne seras plus là. »
Une peine d'exclusion ?La défense creuse la jurisprudence, offre des condamnations dans des dossiers comparables aux jurés pour qu'ils aient des repères, retrace l'origine du poignard, souvenir d'un ancien beau-père de l'accusé, pas acheté pour commettre ce méfait.
Il aurait été calme ? À l'arrivée des policiers, certes. mais plusieurs témoins l'ont vu paniquer, juste après les faits. Alors elle plaide le contexte particulier, de rupture. Et nuance : « Si vous suivez les réquisitions, il aura 70 ans à sa sortie, termine-t-elle. C'est un être imparfait. Mais est-il à ce point monstrueux qu'il mérite d'être exclu à jamais de la société ? »
La cour d'Assises répond à ses questions depuis 18 h 15. Verdict attendu dans la soirée, ce mardi 25 juin.
Pierre Chambaud